FICHES- NOTIONS SUR L’ARGUMENTATION
Une argumentation permet de prouver ou de réfuter une opinion, un fait ou un énoncé, en
cherchant à convaincre son public, à l’oral ou à l’écrit. L’auteur affirme une position
personnelle, qu’elle appuie par des arguments solides, des preuves, qu’elle organise dans un
discours bien structuré.
Elle peut être définie selon deux critères :
- Les procédures qui conduisent à la persuasion
- Le processus par lequel l’auteur construit son discours et permet au destinataire de
le reconstruire à son tour pour obtenir son adhésion
I- TYPOLOGIE DES DISCOURS ARGUMENTATIFS
Types de productions
Il existe une très grande diversité de productions : le dialogue à visée argumentative, l’essai,
la critique (de film, de livre…), l’éditorial, la chronique, la publicité, le plaidoyer judiciaire, la
lettre de motivation, le compte-rendu de débats etc. En situation d’écriture, la production
argumentative rassemble des activités écrites et orales, sans se limiter au seul texte
argumentatif.
Les genres de l’argumentation
- L’apologue est un court récit, en prose ou en vers, qui présente une vérité d’ordre
moral, souvent de manière allégorique. Il associe une partie narrative à une autre
argumentative. Parmi les sous-genres, citons la fable, la parabole (récit allégorique
qui utilise des scènes quotidiennes), le conte philosophique, l’utopie (récit fictionnel
qui conduit à une critique du monde réel) - L’essai dans lequel l’auteur s’implique totalement, sans chercher à épuiser le thème
analysé - Le dialogue est une forme de la délibération (voir V) : dialogue romanesque, dialogue
théâtral, dialogue philosophique (ex Platon)
Les registres
Le didactique a un objectif pédagogique qui vise la transmission d’une vérité, d’un savoir.
Le polémique dénonce une situation pour obtenir l’adhésion du destinataire
Le satirique dénonce une situation ou un comportement par la raillerie
Situation de communication
Elle met en avant un émetteur, celui qui prend position ou expose son avis, ainsi qu’un
destinataire ciblé. L’émetteur utilise l’argumentation pour obtenir l’adhésion du
destinataire, pour l’influencer et/ou le persuader. Le thème choisi par l’émetteur amène une
thèse qu’il développe par la suite à l’aide d’arguments. La situation de communication doit
tenir compte du contexte spatio-temporel de l’énoncé, de son contexte social, économique,
politique, mais aussi du lieu social de production et de réception. Il faut prendre en
considération le statut du destinataire, ses croyances, les valeurs en usage dans la
communauté.
Dans certains discours, l’émetteur commence par l’exorde, une entrée brève et incisive pour
capter l’intérêt du destinataire, et termine par une péroraison, en faisant appel à ses
sentiments. Le destinataire peut être directement interpellé, ou même se sentir culpabilisé.
Enonciation
Dans l’énoncé argumentatif l’émetteur ou locuteur peut être présent : on utilise les 1ère et
2ème personnes et des marques de jugement. Il peut aussi ne pas se manifester directement,
prendre l’objectivité apparente du discours explicatif. Dans ce cas, la 3ème personne et les
phrases déclaratives sont courantes. Le temps généralement utilisé est le présent de
l’indicatif.
Le lexique témoigne de l’implication de l’émetteur. Le degré de certitude est important et
les modalisateurs sont variés : adverbes, locutions verbales… Il emploie, en outre, un
langage d’ordre affectif pour émouvoir le destinataire et se montrer sincère dans ses propos,
ainsi que des figures de style. Les connotations traduisent des jugements de valeurs, qu’elles
soient mélioratives ou péjoratives.
STRUCTURE DE L’ARGUMENTATION
Le discours argumentatif est structuré dans sa forme : signes typographiques, découpage
des paragraphes, liens logiques ou chronologiques pour passer d’une idée à une autre et
marquer les étapes du raisonnement. Sa structure relève, de même, du type
d’argumentation :
Argumentation pour expliquer un fait (de cause à effet) :
L’auteur expose un fait, analyse les causes et présente les conséquences. Il organise la
réflexion autour de plusieurs axes, qui constituent chacun une partie du plan.
Argumentation par accumulation :
L’auteur présente une opinion, à laquelle il adhère, liste les arguments qui la justifient et
utilise des exemples qui viennent les illustrer.
Argumentation par opposition :
L’auteur présente un thème, énonce ses arguments : aspects positifs et aspects négatifs,
avantages et inconvénients.
Les arguments
Définition et organisation
Un argument est un énoncé, utilisé pour justifier ou rejeter une proposition, une idée, un
point de vue. Son but est de provoquer l’adhésion du public ou de modifier son opinion.
Un argument peut être un énoncé présentant une vérité acceptée par tous et qui ne peut
pas être contestée. Ce peut être aussi une idée abstraite qui nécessite d’être développée
pour être bien comprise et acceptée par l’autre.
Les arguments doivent s’enchaîner de manière logique pour persuader l’autre du bien-fondé
de sa position personnelle. Ils doivent aussi constituer un ensemble homogène, l’un
amenant à l’autre. Les arguments peuvent être placés dans un ordre croissant, décroissant
ou nestorien (l’ensemble débute et se termine par les arguments les plus forts, et les plus
faibles sont situés au centre).
Typologie des arguments et raisonnements
On distingue les arguments persuasifs ou rhétoriques, des arguments démonstratifs ou
logiques (par exemple la cause et la conséquence, l’adjonction, de concession).
La typologie fait apparaître plusieurs raisonnements possibles : raisonnement causal,
dialectique, concessif, déduction ou induction, par analogie, par l’absurde, le dilemme,
l’ironie. Les arguments sont soit d’autorité ; ils reposent sur le statut de l’émetteur ou sur
des références culturelles diverses (historiques, morales, scientifiques etc.), soit de bonne ou
de mauvaise foi. Dans les arguments de mauvaise foi, on identifie la tautologie
(raisonnement en cercle vicieux), le prétexte (raison erronée permettant de se tirer d’un
faux pas), l’argument ad hominem (qui s’appuie sur la personnalité de l’adversaire pour le
condamner).
- Le raisonnement causal s’appuie sur les causes d’une situation, d’un fait ou d’un
phénomène. L’auteur en tire des conséquences - Le raisonnement dialectique repose sur la thèse, l’antithèse et la synthèse, surtout
employé lors d’un dialogue qui met en opposition deux opinions différentes - Le raisonnement concessif commence par le fait d’admettre les arguments adverses
pour ensuite développer et maintenir son propre point de vue - Le raisonnement par déduction part d’idées générales et objectives pour arriver à
une conclusion particulière (démarche mathématique) - Le raisonnement par induction part de faits particuliers, parfois cités en exemples, et
aboutit à une conclusion générale. Comme dans les sciences expérimentales, on part
de l’observation et on obtient une vérité générale - Le raisonnement par analogie met en parallèle deux domaines et en fait ressortir les
ressemblances. De ce rapprochement apparaît une opinion nouvelle - Le raisonnement par l’absurde sert à disqualifier les propos de l’adversaire, en faisant
état de conséquences absurdes d’une proposition opposée à celle de l’auteur - Parmi d’autres stratégies, le dilemme cherche à enfermer l’adversaire dans un choix
impossible. L’ironie permet de faire croire à l’acceptation d’une opinion pour ensuite
la ridiculiser. C’est l’un des outils de la polémique, très utilisé au XVIIIème siècle.
L’organisation du discours argumentatif
L’introduction
Elle annonce le thème, le sujet traité, apporte un point de vue, énonce les différents
éléments qui nécessitent un développement.
Le corps du discours
Les arguments demandent des faits et des références clairs et précis. Les faits mentionnent
les dates, les situations, les événements. Les références à des études, à des données
statistiques, dont les sources sont indiquées, permettent la validité des arguments. Les
citations et les énoncés de vérité générale peuvent faire autorité, de même que l’apport de
l’opinion générale, des valeurs morales et sociales.
La conclusion
Elle relance l’idée de départ pour l’affirmer de manière définitive ou pour relancer un débat
plus large. En ce sens, elle peut conduire à une nouvelle piste de réflexion.
Les procédés argumentatifs
L’explication
Elle amène toute une série de précisions qui permettent d’éclairer le destinataire et de
répondre à son questionnement. L’explication sert ainsi à étayer son point de vue.
La démonstration
On cherche avant tout à justifier un fait ou un point de vue, en démontrant que ce qu’on
avance est évident et doit être accepté par le bon sens commun.
La réfutation
On rejette la thèse adverse en utilisant le lexique de la concession, puis de la négation et de
l’opposition. Cela permet de mieux affirmer son opinion et d’attirer avec plus de force
l’adhésion du destinataire.
La délibération
Ce procédé vise à analyser le pour et le contre avant de trancher. L’opinion se construit à
partir de la synthèse des arguments étudiés. On discute ou on réfléchit en examinant les
différents aspects du problème ou du thème. On peut établir un dialogue avec des
personnes dont les opinions sont contradictoires, ou s’engager dans un monologue
délibératif.
Les liens logiques
Les articulations logiques peuvent être implicites. Il faut analyser la ponctuation,
l’organisation des paragraphes, le lexique et le jeu des temps. Si elles sont explicites,
elles sont signalées par les liens ou connecteurs logiques (voir tableaux).
TABLEAU 1
Relation | Mot ou locution |
Alternative | Ou…ou ; autrement ; sinon ; soit…soit |
But | Pour ; pour cela ; afin que (de); dans le but de ; de manière que ; de crainte que ; de peur que ; de façon que |
Cause | A cause de ; car ; parce que ; attendu que ; comme ; grâce à ; en raison de ; étant donné que ; vu que ; en effet ; du fait que ; puisque ; d’autant plus que, sous prétexte que ; dans la mesure où ; non que |
Condition | A condition que ; si ; à supposer que ; au cas où ; en cas de ; sans doute ; à moins que ; en admettant que ; dans l’hypothèse où ; pourvu que ; suivant que ; pour peu que ; quand bien même ; si ce n’est ; probablement |
Conséquence | En conséquence ; par conséquent ; ainsi ; donc ; or ; c’est pourquoi ; dès lors ; de là ; aussi ; si bien que ; assez pour que ; trop pour que ; à tel point que ; tant …que ; si… que ; tellement que ; de sorte que ; de manière à ; de façon à |
Concession ou restriction | Excepté ; mais ; pourtant ; malgré ; cependant ; néanmoins ; toutefois ; même ; quoique ; du reste ; sauf ; hormis ; le cas échéant ; exception faite de ; mis à part ; bien que ; en dépit de |
TABLEAU 2
Relation | Mot ou locution |
Introduire | Au préalable ; tout d’abord ; en premier lieu ; pour commencer ; premièrement ; avant tout |
Classer Ajouter | D’une part…d’autre part ; puis ; ensuite ; non seulement…mais encore ; premièrement…deuxièmement Et ; également ; en outre ; de plus ; en plus de ; de surcroît ; mais encore ; par ailleurs ; voire ; au surplus ; ajoutons ; avec ; quant à ; sans compter que ; dans un autre ordre d’idées, sans parler de ; venons-en à |
Annoncer un résumé de ce qui précède | Bref ; en résumé ; en un mot ; en d’autres termes ; somme toute ; pour ces raisons ; cela revient à dire que ; en substance |
Affirmer | Bien sûr ; sans aucun doute ; évidemment ; certes ; effectivement ; à mon avis ; pour ma part ; selon moi ; à titre personnel ; quant à moi |
Insister | Remarquons ; mettons l’accent sur ; en particulier ; à plus forte raison ; surtout ; d’autant plus que |
Expliquer | C’est-à-dire ; en d’autres termes ; sur ce point ; à ce sujet ; pour ce qui est de ; sur le plan de ; en ce qui concerne ; en matière de ; en tant que ; relatif à ; en effet |
Comparer | Comme ; de même que ; également ; à la façon de ; à l’image de ; conformément à ; de même que ; contrairement à ; ainsi que ; autant…autant ; au même degré que ; aussi…que ; tel…que ; plutôt…que ; plus…que ; moins…que |
Illustrer | C’est le cas de ; comme ; ainsi ; à savoir ; par exemple ; notamment ; entre autres ; c’est ainsi que |
Opposer | Mais ; en revanche ; or ; toutefois ; au contraire ; alors que ; quoique ; en dépit de ; cependant ; par contre ; pourtant |
Exprimer une notion de temps | Après ; alors que; plus tard ; antérieurement ; par la suite ; bientôt ; ensuite ; avant cela ; maintenant ; désormais ; au moment où ; chaque fois que ; dès que ; jusqu’à ce que ; lorsque ; tandis que |
Conclure | En somme ; en conclusion ; somme toute, finalement ; en définitive ; au total ; en dernier lieu ; au fond ; en bref ; tout bien considéré ; pour conclure |
Les figures de style
Elles appuient la thèse et la renforcent dans un style très personnel. Ce ne sont pas de
simples ornementations du discours argumentatif. La métaphore argumentative notamment
ne possède pas seulement une visée persuasive ; elle est une forme argumentative
complexe, qu’il faut parfois analyser dans sa particularité
– Les figures d’analogie et de substitution :
Comparaison, métaphore, personnification, allégorie, prosopopée, antonomase, métonymie
– Les figures d’atténuation:
Litote et euphémisme
– Les figures d’insistance et d’amplification:
Anaphore, répétition, énumération, gradation, hyperbole
– Les figures d’opposition:
Antithèse, oxymore, chiasme, paradoxe, antiphrase